Procureur Idrissa Hamidou Touré

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Idrissa Hamidou Touré est d’abord l’homme qui utilise les formules « choc ». « Autant je répugne l’abus de pouvoir, autant je répugne le désordre et l’impunité » aime t-il rappelé. Son idole est le magistrat français Éric de Montgolfier connu pour avoir fait trembler des hommes puissants en France. C’est un peu le modèle du magistrat malien. « Notre rôle n’est pas de plaire, mais de déplaire à la limite », lance-très souvent Touré.

Ce procureur  consent à dire deux choses. Pour lui, il faut respecter la présomption d’innocence ; ensuite, nul n’est au-dessus de la loi.

Interview

Comment se porte la justice aujourd’hui de façon globale?

Idrissa Hamidou Touré : La justice se porte bien, en dépit des péripéties, des récriminations… Ce qui se comprend aisément dans un pays où les institutions socio-politiques sont presque à terre. Partout au monde où tel a été le cas, c’est la justice qui cristallise les frustrations quand elle reste la seule institution debout et c’est le cas de notre pays actuellement.

Notre pays traverse une phase importante de son histoire caractérisée par une aspiration accrue des citoyens à plus de justice à travers une refondation de la gouvernance. Quel rôle les acteurs de la justice devraient jouer dans ce processus ?

Idrissa Hamidou Touré : Leur rôle habituel qu’est celui de régulation des comportements sociaux, de manière à rappeler constamment aux uns et aux autres que nous vivons dans une société civilisée ; que nous avions des règles auxquelles nous avions librement souscrit et que l’on doit respecter à l’impératif. Dans cette optique-là, nous continuerons de combattre l’injustice et l’impunité pour maintenir ou ramener la confiance quelque peu légitimement ébranlée du peuple dans son appareil judiciaire. La justice est humaine, résolument humaine, donc faillible. Elle peut se tromper et le reconnaître honorablement, s’amender et poursuivre son périlleux et ingrat rôle social de dire qui a tort et qui a raison. Nous ne sommes pas des Dieux même si l’on est quelque peu l’image vivante de la divinité sur terre.

Pensez-vous que les magistrats ne méritent pas les critiques formulées à leur encontre ?

Idrissa Hamidou Touré : Absolument que non. Être magistrat, c’est l’acceptation d’être discuté, voire critiqué dans l’opinion publique. Seulement cela doit se faire dans le strict respect des règles de la démocratie et surtout pas parce qu’il a rendu une décision qui nous est défavorable. Puisque les voies de recours existent pour la combattre. Ce qui est condamnable de la part de certains, ce sont les dérives du genre attaque personnelle, dénigrements gratuits, injures, atteinte à l’honneur, à la dignité ou à la délicatesse de la fonction de magistrat, etc. Ces actes ne sont pas permis car ils ne sont pas pris en charge par le droit à la liberté d’expression.

Vos mandats de dépôt décernés récemment contre plusieurs célébrités ont fait couler beaucoup d’encre et de salive. Certains compatriotes vous taxent d’abuser de votre pouvoir. Comment appréciez-vous ces accusations ?

Idrissa Hamidou Touré : Je suis un magistrat. J’appartiens à un pouvoir permanent. C’est à la loi seule et à ma conscience professionnelle que je dois rendre compte et surtout pas à des gens libres et indépendants par vices plutôt que par vertus, qui se veulent la médiocrité, le désordre et l’anarchie érigés en mode de vie. Dans un pays où l’on justifie, trouve des excuses à l’immoralité, à l’indécence, à la transgression des valeurs sociétales, que voulez-vous que nous répondions à ceux qui pensent que nous en faisons trop contre les adeptes des injures grossières, du désordre et de l’impunité. C’est à ceux qui sont sensibles au respect de nos us et coutumes, à la dignité, à l’honneur, que nous devrons des excuses si l’on ne fait pas assez pour rétablir l’ordre.

On ne tombera dans aucun abus, plaise à Dieu parce que nous savons jusqu’où l’injustice peut conduire un homme. Je l’affirme avec certitude et sous serment. Je peux me tromper parce que je reste humain, mais je répugne l’abus de pouvoir, l’injustice, voire le désordre. Ceci étant, nul ne bénéficiera de frilosité ou de passivité de notre part. L’impunité, sous toutes ses formes, sera rigoureusement combattue. Jamais, depuis Soumangourou Kanté jusqu’à Moussa Traoré, le Mandé n’a été gouverné dans le laxisme, le laisser-aller… Le Mandé se gouverne par autorité et rigueur. C’est cela notre culture et tous ceux qui ont voulu déroger à cette règle ont échoué.

 

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