Le président Buhari sous pression
Muhammadu Buhari ferait-il fausse route dans sa politique restrictive des échanges avec les pays voisins ?
La première économie d’Afrique voit le taux d’inflation atteindre 15,75% en décembre, son plus haut depuis 33 mois, selon les chiffres du bureau national des statistiques, le National Bureau of Statistics (NBS). Le Nigeria qui avait fermé ses frontières d’août 2019 à décembre 2020 (l’importation du riz et de certaines denrées restant interdits) pour stimuler son processus d’autosuffisance alimentaire s’éloigne encore un peu plus des critères de convergence pour l’adoption de l’Eco, la monnaie unique de la CEDEAO.
Cette inflation olympique qui résulte en partie de l’instabilité de la monnaie nationale, le Naira, soutenu à coup de ponctions massives dans les réserves de change, se ressent lourdement dans le panier de la ménagère. Ainsi, le NBS estime que l’inflation des produits alimentaires a atteint 19,56 % en décembre 2020 contre 18,30% un mois plutôt. «Cette hausse de l’indice alimentaire a été causée par l’augmentation des prix du pain et des céréales, des pommes de terre, de l’igname et autres tubercules, de la viande, des fruits, des légumes, du poisson et des huiles et graisses», rapporte l’agence des statistiques.
De même, l’inflation sous-jacente, qui exclut les variations des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, s’est établie à 11,37% en décembre 2020, en hausse de 0,32% par rapport aux 11,05% enregistrés en novembre. Le NBS a estimé que les augmentations les plus élevées au cours du mois avaient été enregistrées dans les prix du transport de passagers par avion, des services médicaux, des services hospitaliers, des chaussures, du transport de passagers par route, des services divers liés aux salons de coiffure et aux établissements de soins personnels.
Première économique d’Afrique, le Nigeria compterait 87 millions de pauvres. Un paradoxe ?
Selon les observateurs, cette inflation est causée par divers facteurs dont entre autres, la pandémie Covid-19 qui a destructuré les paramètres macroéconomiques du pays, la dépréciation de la monnaie nationale et la fermeture des frontières avec les pays voisins. La Chambre de commerce et d’industrie de Lagos (LCCI) et l’Association des industriels du Nigéria (MAN) ont noté en 2020 que la fermeture de la frontière avait fait grimper les prix des intrants et des produits finis au Nigéria. «Pour l’année 2021, nous prévoyons que l’inflation globale restera élevée car la combinaison des chocs de l’approvisionnement alimentaire, des politiques de change (FX), des coûts énergétiques plus élevés, de l’illiquidité des devises, de l’insécurité accrue dans les principaux États producteurs de denrées alimentaires, continuera de faire monter la pression sur les prix à la consommation sur le marché intérieur », a noté Muda Yusuf, directeur général du LCCI, cité par ICIRI News.
Le Nigéria compte le plus grand nombre de pauvres au monde, avec 87 millions vivant dans l’extrême pauvreté, selon un rapport du World Poverty Clock publié en 2018. Le taux de chômage atteint 27 % selon le NBS. Les opérateurs économiques estiment que l’une des mesures permettant de diminuer l’inflation serait d’augmenter les échanges avec les pays voisins. Si le président Muhammadu Buhari persiste dans cette option restrictive du commerce avec les pays voisins, le premier semestre devrait encore voir l’inflation vers de nouveaux records. “Avec les augmentations des prix du carburant entre 25 et 30%, les hausses des prix de l’électricité entre 55 et 65%), la faiblesse de la monnaie et la pression des prix alimentaires, l’inflation globale atteindra 16 à 18% durant la première moitié de 2021”, relève Wale Okurinboye, responsable de la recherche sur les investissements chez Sigma Pensions, cité par nairametrics.com.
Le budget 2021 du pays prévoit que l’inflation atteindra 11,95% en 2021 avec une croissance prevue du PIB de 3%
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