le milliardaire sud-africain Patrice Motsepe
C’est un homme richissime, mais qui n’avait jamais eu de responsabilité dans l’administration du football africain qui vient d’être porté à la tête de la CAF. Ses liens avec la FIFA et sa capacité à évoluer en milieu méconnu seront surveillés de près.
D’une candidature surprise à une victoire sans suspense… Telle fut l’ascension fulgurante et inattendue de Patrice Motsepe dans les instances du football africain. Une progression en sous-marin, pour le beau-frère du chef de l’État sud-africain, Cyril Ramaphosa. Un candidat furtif à l’extrême, absent pour cause de Covid-19 lors de l’annonce de sa candidature pour la direction de la Confédération africaine de football (CAF). À l’heure des visioconférences, l’aspirant président n’est même pas présent.
Le poste, murmure-t-on dans le milieu, ne lui ressemble pas. « Patrice Motsepe est plus un fan de football qu’un dirigeant de football », résume le journaliste sportif sud-africain Khuliso Nemarimela. Certes, le Mamelodi Sundowns, le club qu’il a acheté en 2004 et qui est devenu champion d’Afrique en 2016, est l’un des poids lourds du continent et son succès est évidemment lié aux investissements de Motsepe. Mais le milliardaire « ne s’impliquait pas vraiment dans la gestion administrative du Mamelodi Sundowns », raconte Khuliso Nemarimela, qui suit l’équipe de Pretoria depuis 2014.
Un gestionnaire
Ces quatre dernières années, la CAF a plongé dans une crise morale et financière. En 2019, Ahmad Ahmad rompt un contrat d’un milliard de dollars signé sur dix ans avec le groupe Lagardère pour la gestion des droits médias marketing de la CAF. Conséquence, le football africain est aujourd’hui un écran noir sur les télévisions du continent. Danny Jordaan, le patron de la fédération sud-africaine, en a fait une priorité : « Si vous voulez regarder n’importe quel match de football continental, il ne sera diffusé sur aucune chaine. Et ça, c’est un revenu de plus de 200 millions de dollars qui est perdu pour le football africain. » Depuis deux ans, les finances de la CAF sont d’ailleurs mal en point : en 2020, cette dernière a perdu 11,4 millions de dollars
Or s’il est une qualité que personne ne conteste à Patrice Motsepe, c’est sa capacité à générer de l’argent. « J’ai commencé dans les affaires en achetant des mines qui étaient déficitaires, vieilles et fermées », résume sommairement le magnat. Son auditoire connaît de toute façon la suite : fortune dans les mines dans les années 1990, diversification de ses activités dans les assurances et les services financiers, premier milliardaire noir d’Afrique du Sud, neuvième fortune africaine et l’un des « 100 esprits d’entreprise » du siècle, selon le magazine Forbes. Pour le journaliste sportif suf-africain Lenn Moleko, la CAF a élu un gestionnaire. « Question finances, il sait y faire faire ; question football c’est autre chose, analyse-t-il. Avec son club il a fait du bon travail, mais est-ce la bonne personne pour diriger le football africain ? »
Élu à l’issue d’un scrutin qui, au final, n’a pas vraiment eu lieu, Patrice Motsepe sait qu’il va devoir convaincre. « J’attends de lui qu’il soit proactif et réellement disponible pour les membres de l’association », annonce Lamin Kaba Bajo, le patron de la fédération gambienne de football. Patrice Motsepe prévoit de rencontrer tous les présidents, sans exception, durant sa première année de mandat. Soit – si on le prend au mot – 54 visites en 52 semaines.
Le débutant veut aller vite et promet de ne pas se représenter si son mandat n’est pas concluant. En attendant, Patrice Motsepe dit ressentir « une urgence absolue » à réparer le football africain. « Sauvez notre football ! », suppliait le journal sud-africain Mail&Guardian dans ses colonnes. « Il est un peu comme Tony Stark [le héros Marvel] : il a l’argent et il pense pouvoir sauver le monde avec, conclut Lenn Moleko. Mais il n’est pas un super héros. »
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