Cellou Dalein Diallo
Économiste, ancien Premier ministre, chef de l’opposition guinéenne, Cellou Dalein Diallo évoque, dans cet entretien , en toute liberté et sans concession, son combat, sa vison pour la Guinée. Le président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UDFG), entouré de son premier cercle de conseillers, lance un appel au peuple guinéen pour défendre sa Constitution face au spectre d’un 3e mandat.
Le spectre du 3e mandat guette la Guinée. Pensez-vous que votre pays pourra y échapper ?
Je suis persuadé et convaincu que la Guinée peut y échapper car le Président Alpha Condé a tout tenté. La Constitution ne lui permet pas de se maintenir au pourvoir. C’est un engagement fort que le peuple guinéen a pris pour défendre la Constitution en verrouillant les dispositifs de l’article prorogeant la durée du mandat. En Guinée, les dispositions constitutionnelles relatives au nombre et à la durée du mandat présidentiel sont intangibles. Elles ne peuvent en aucun cas faire l’objet de révision. L’article 27 de la Constitution guinéenne dispose qu’en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels, consécutifs ou non. Le dispositif est verrouillé : «La forme républicaine de l’État, le principe de la laïcité, le principe de l’unicité de l’État, le principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs, le pluralisme politique et syndical, le nombre et la durée des mandats du Président de la République, ne peuvent faire l’objet d’une révision. Mais Alpha Condé a trouvé une parade en voulant adopter une nouvelle Constitution. Mais le peuple de Guinée est fortement mobilisé pour empêcher cet assassinat programmé.
Vous êtes candidat à la prochaine présidentielle, pourquoi les Guinéens doivent-ils vous choisir ?
Les Guinéens me connaissent car j’ai l’opportunité d’occuper de hautes fonctions dans le pays, en luttant contre la corruption et la modernisation de la Cité. Ce n’est pas pour rien qu’en 2010, j’ai pu avoir 44% de l’électorat devant 24 candidats. Alpha Condé qui venait en deuxième position n’avait que 18%. Cette confiance est restée et a été consolidée. Aujourd’hui, les Guinéens me réclament parce qu’ils savent que je suis attaché aux principes et aux valeurs qui font partie de leurs attentes. Or, en Guinée, on veut une démocratie apaisée, un Etat de droit ; on veut en Guinée, une solution. Alpha Condé a utilisé la division ethnique pour s’emparer du pouvoir et le conserver. Aujourd’hui, il faut une réconciliation nationale et le peuple sait que je suis capable de promouvoir la tolérance, la fraternité et la solidarité entre les peuples. Et aux dernières élections locales, cela a été prouvé.
N’êtes-vous pas fatigué de la vie d’opposant ?
Depuis dix ans, s’opposer n’a pas été facile, surtout face à la transhumance. Mais d’autres de la mouvance présidentielle sont en train de nous rejoindre. Je suis pressé d’accéder au pouvoir, non pas pour profiter du pouvoir, mais pour apporter des transformations dans le pays. Le camp du pouvoir s’empare sans vergogne des richesses, comme l’exportation minière qui est passée de 15 millions de tonnes en 2015 à 60 millions en 2019. La masse salariale a besoin de cela. Aujourd’hui, il y a l’or, le diamant et toute cette richesse minière est exploitée au profit du clan présidentiel. Les infrastructures continuent à se dégrader. Pas de routes en Guinée, le système éducatif est en cale sèche. Je suis convaincu qu’il y a urgence à apporter des réformes nécessaires aux conditions de vie des populations. Il faut réconcilier le peuple longtemps divisé sur le plan ethnique. Je vais construire une République de citoyenneté et chaque citoyen se sentira en sécurité et jouira de tous ses droits, indépendamment de son appartenance politique et ethnique. C’est de cela que les Guinéens ont besoin et réclament. Et ils savent à quel point je suis attaché à l’égalité des chances des citoyens, il a trop de discrimination et d’exclusion basées sur l’appartenance ethnique.
On vous reproche souvent d’adopter la politique de la chaise vide ?
Le Président de la République a instruit au Premier ministre de convoquer les concertations sur l’opportunité de changer la Constitution. La décision était déjà prise pour Alpha Condé de la changer pour pouvoir légitimer son action. Il n’y a pas eu de débat, pas de problème susceptible d’engager le pays dans une nouvelle constitution. Tous les articles sont révisables, sauf ceux que je viens de rappeler et qui ont été verrouillés. Pendant cette campagne, il a tout remis en question. Ce qui le dérange, c’est l’article qui réfute son maintien au pouvoir. Toutes les autres dispositions sont révisables. Il ne veut pas de la limitation des mandats, l veut dire que toute la Constitution est mauvaise. Son seul souhait est de se maintenir au pouvoir. S’il veut changer de mandat de collectivités, il peut le faire. Il peut faire un amendement à l’Assemblée aussi.
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